Aux alentours de 4 ans, l’enfant aime pratiquer une activité particulière : il découpe papiers et cartons, puis les assemble, les colle, demande à ce qu’on les agrafe pour lui. Il découpe magazines ou catalogues périmés et peut passer un long moment à ce jeu. Pour être exact, on pourrait dire qu’il découpe son « je ». Entendons par là qu’il confectionne et sculpte son « je », son moi, sa personnalité. Bizarre, non ?
Microscope : imaginons que vous êtes en train de réaliser un puzzle, fait de légères feuilles de papier de soie. Il fait chaud, les fenêtres sont ouvertes, soudain un courant d’air. Drame ! Les papiers de soie s’envolent au vent. Tout est chamboulé, n’est-ce pas ?
L’enfant rassemble tout ce qui le constitue
Reportons-nous à ce que cela représente pour un enfant. Entre l’âge de 2 et 4 ans, l’enfant rassemble tout ce qui le constitue : Papa, Maman, mon doudou, la crèche, les jouets, ma chambre, Papi et Mamie, mon biberon du matin, la peur, la jalousie, les câlins, les pleurs, les peurs, etc. TOUT !
Tout ce monde doit être relié, avoir une cohérence, un sens, une logique. Et, s’il vous plait, en deux ans et pas plus. Dur labeur qui attend notre « architecte en restauration d’intérieur ».
Toutes les parcelles citées sont des morceaux d’un puzzle fait de papier de soie. Ces morceaux du moi vont bâtir la future personnalité de l’enfant maintenant qu’il parvient à les rassembler en un tout cohérent. Nous savons combien l’enfant a besoin, grâce au jeu, de se représenter lui-même : se reconnaître dans le miroir, jouer à la maîtresse, au docteur qui fait la piqûre, à la maman, etc.
Dans notre exemple, l’enfant joue à l’assembleur. Il rassemble des morceaux de papier et carton et en fait un carnet, un livre, un patchwork, pour constituer une pièce unique, comme lui. Il est unique, c’est-à-dire un, indivisible, entier et non morcelé. Laissez-le jouer au découpage et recollage, car c’est ainsi qu’il élabore sa future personnalité.
par Harry Ifergan, psychologue et psychanalyste