Viagra

Quand le Viagra ne sert à rien

Les hommes jeunes sont de plus en plus nombreux à essayer le Viagra (ou le Cialis ou le Levitra , les autres inhibiteurs de PDE5) au moindre signe de ce qu’il considère être un problème sexuel.

Il ne s’agit même pas systématiquement d’une difficulté à avoir une érection (ce qui est précisément ce que les inhibiteurs de PDE5 traitent). Certains de mes patients m’en ont demandé parce qu’ils éjaculaient trop rapidement, ou au contraire parce qu’ils mettaient trop longtemps à éjaculer, ou bien parce que leur désir sexuel était trop faible. Le manque de désir sexuel et les inhibiteurs de PDE5 ne sont pas complètement sans lien. En effet, si un homme a des troubles de l’érection, il se peut que la prise d’un inhibiteur de PDE5 augmente son désir sexuel car il aura plus d’espoir (et la probabilité sera plus élevée) d’avoir une expérience plaisante.

Lorsque des hommes jeunes (moins de 40 ans) ont un problème sexuel, l’explication est le plus souvent d’ordre psychologique et non d’ordre physique (il y a des exceptions mais le pourcentage est probablement inférieur à 10 %). Parfois, les hommes qui ressentent une forme d’anxiété au moment d’avoir un rapport sexuel sont parmi les premiers à se faire prescrire des inhibiteurs de PDE5 par leur médecin, souvent avant même d’avoir essayé de résoudre leur problème sur le plan psychologique. Je ne pense pas me tromper en disant que certains hommes jeunes considèrent que le fait d’avoir ne serait-ce que deux expériences sexuelles négatives est une raison suffisante pour essayer l’option chimique.

Il y a aussi une tendance chez les plus jeunes à prendre des inhibiteurs de PDE5 pour améliorer leur expérience sexuelle, et ce même lorsqu’ils ne rencontrent aucun problème fonctionnel en particulier. Ils cherchent simplement à maximiser leur expérience sexuelle, et parfois celle de leur partenaire. J’ai parfois eu à faire à des patients qui étaient à la fois des « maximisateurs » et des éjaculateurs précoces. Ceux-là espèrent qu’ils pourront plus facilement avoir une autre érection ou ils espèrent que leur érection sera à son maximum (et donc satisfaisante pour leur partenaire), même si elle est de courte durée.

Dans le journal alternatif local, un journaliste a essayé de voir s’il pouvait obtenir une ordonnance pour du Viagra sans avoir de réel problème sexuel. Il a écrit un article sur sa quête. Il était dans la catégorie des curieux. Il voulait savoir si ce serait meilleur avec, un peu comme, à divers moments dans l’histoire, les hommes ont fait l’expérience de faire l’amour sous l’emprise de substances chimiques de toutes sortes.

Je conseille aux hommes ayant des troubles de l’érection d’aller consulter un sexologue afin que celui-ci évalue rapidement s’il s’agit ou non d’une cause physiologique. Le scénario idéal, c’est que ce sexologue ait de bonnes relations de travail avec un urologue qui s’intéresse à la fonction sexuelle de l’homme. Le sexologue peut travailler sur les causes psychologiques potentielles et l’urologue peut vérifier le bon fonctionnement organique.

Il s’agit là d’une autre tendance qui m’inquiète également, à savoir celle qui consiste pour certains médecins à prescrire des inhibiteurs de PDE5 à n’importe quel homme qui en fait la demande. Je suis conscient que le temps que la plupart des médecins passent avec chaque patient est limité (parfois de leur fait, ou parfois en raison du cadre dans lequel ils travaillent). Malheureusement, cela revient à proposer une aide expéditive, sans prendre la peine de réaliser un diagnostic personnalisé et solide.

Certains hommes jeunes choisissent l’option des inhibiteurs de PDE5 dès leurs premières difficultés sexuelles et ils deviennent dépendants. Ensuite, ils ont tendance à beaucoup hésiter avant d’avoir des relations sexuelles sans avoir pris d’inhibiteur. Ce qui, d’une certaine façon, rend plus difficile le traitement des troubles sur le plan psychologique, alors que généralement, c’est précisément ce type de traitement qui est nécessaire.

  • Publié: 15/10/2013 12:44
  • Par Mark Andris
  • 152679 vues
comments powered by Disqus