La vie quotidienne des familles avec une personne polyhandicapée

Chaque parcours familial est personnel. Les difficultés de l'enfant peuvent apparaître d'emblée à la naissance, ou se révéler peu à peu chez un enfant n'ayant pas donné d'inquiétudes en période périnatale. Mais habituellement, l'association de déficiences sévères se révèle tôt, dans les premières années de vie.

Il n'est pas exclu cependant qu'un adulte jusque là normal, à la suite d'un traumatisme, d'une encéphalite, d'une maladie dégénérative, présente progressivement un tableau de polyhandicap grave. Les situations sont ici très différentes mais les soins nécessaires peuvent être similaires (compte tenu de l'âge bien sûr).

Dans la petite enfance, la période de découverte progressive des différentes déficiences est toujours un bouleversement pour la famille. C'est aussi la période des bilans hospitaliers, parfois lourds et contraignants, semés de rencontres qui ne se passent pas toujours bien. Pourtant, tout doit être fait pour parvenir à un diagnostic aussi précis que possible, indispensable pour un pronostic et pour le conseil génétique, d'où des examens ou parfois des hospitalisations répétées programmées.

De plus, ces petits enfants sont fragiles; les troubles alimentaires, les convulsions fréquentes, le retard de croissance, les infections, les troubles du sommeil, grèvent la vie familiale et peuvent devenir intolérables. Il faut alors savoir proposer une prise en charge plus importante en collectivité spécialisée (pouponnières spécialisées), ce qui n'implique pas une séparation totale d'avec la famille.

Il arrive souvent que les troubles moteurs soient les premiers repérés. Ils sont parfois masqués sous le terme de « retards psychomoteurs », qui peut être dangereux parce qu'il fait obstacle à un vrai diagnostic et entretient l'illusion d'une réversibilité totale. Mais la prise en charge de ces troubles moteurs par des techniciens ouverts est un premier pas vers une meilleure connaissance de l'enfant et une aide pratique à la famille. Les efforts éducatifs, la stimulation globale ne doivent pas pour autant être omis, car c'est dans une dynamique de développement que l'enfant doit être engagé. Presque toujours l'enfant progressera.

Pour la famille, la prise de conscience progressive de la limitation des possibilités de compréhension et de communication est l'épreuve la plus douloureuse, jalonnée d'illusions et de découragements successifs. Il faut savoir aussi qu'il peut y avoir des situations ou des périodes dans la vie d'une famille où le cumul des difficultés et la crainte de l'avenir conduisent à un tel désespoir que les efforts éducatifs paraissent dérisoires et que seule une aide soutenue des parents pourrait éviter des catastrophes. Ces situations ne sont pas les plus fréquentes mais peuvent aussi être masquées sous des demandes disproportionnées d'efforts éducatifs ou de thérapeutiques diverses. Il n'est pas toujours facile de décoder les éléments d'un dialogue entre les parents et le médecin ou les thérapeutes, dialogue qu'il faut avant tout s'efforcer de maintenir dans un accueil qui ne soit pas purement technique.

Chaque étape de la vie de l'enfant pose de nouveaux problèmes et réveille la blessure du handicap. Vers 3 ans, on pense à une insertion dans un groupe d'enfants. Sont parfois possibles, quand ces structures existent, des accueils de groupes d'enfants suivis par des SESSD (services d'éducation et de soins spécialisés à domicile), ou un accueil en halte garderie spécialisée. L'école maternelle n'est qu'exceptionnellement possible pour l'enfant polyhandicapé. Les externats sont en nombre insuffisant. Cette quête d'un lieu d'accueil peut durer plusieurs années et aboutir parfois à un internat, parfois au maintien en famille avec un accueil de jour. Mais dans tous les cas les difficultés matérielles ont tendance à s'aggraver avec la croissance. Néanmoins, la tolérance et les ressources que la famille mobilise pour l'enfant sont souvent remarquables.

L'adolescence est un temps difficile où le jeune handicapé devient plus lourd, où les soins deviennent malaisés et où certains handicaps s'aggravent (l'épilepsie parfois, les scolioses souvent). Toutefois, au cours de l'adolescence et bien au-delà à l'âge adulte, des progrès minimes d'autonomie peuvent encore se faire jour. C'est à cette période qu'apparaît la nécessité d'une tutelle, le changement de statut de cet adulte encore dépendant, et la recherche difficile d'une orientation (foyer ou MAS).

  • Publié: 07/01/2012 16:11
  • Par Mark Andris
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